L'empire des grandes basses
Une sélection de 14 chanteurs, par ordre alphabétique, qui ont profondément marqué l'histoire du chant dans leur tessiture et leur répertoire
Kim Borg
Basse finlandaise (7.08.1919 - 28.04.2000)
Né à Helsinki, il suit des études chimie pour devenir ingénieur. Il chante également régulièrement dans différents chœurs et prend des cours à l'Académie Sibelius. Pendant la guerre il doit rejoindre l'armée finlandaise où il sert comme photographe. Après la guerre, il retourne étudier la composition à l'Académie Sibelius d'Helsinki et le chant à Copenhague puis Stockholm. Il donne de premiers concerts dès 1947 et début sur scène à Aarhus au Danemark dans le rôle de Colline dans La bohème, puis dans le rôle de Gremine dans Eugène Oneguine à l'Opéra de Copenhague en 1952. Il est immédiatement engagé pour enregistrer pour HMV-EMI auprès de Boris Christoff les rôles de Schelkalov et Rangoni dans Boris Godounov en juillet de cette même année 52. A partir de là il se produit régulièrement à Copenhague et Helsinki. En 1956 il incarne Don Giovanni au festival de Gyndebourne, en 1959 il débute avec le compte Almaviva dans Les noces de Figaro au Metropolitan Opera de New-York où il se produit pendant qautre saisons de suite. Sa carrière l'amène au cours des années 1950 et 1960 à Milan, Vienne, Hambourg et même Moscou dans Boris Godounov. Il participe également aux festivals d'Edimbourg dès 1956, Glyndebourne (en 1956, 1959 et 1968) et Salzbourg (La création d'Haydn en 1965, Pimène en 1966 et 1967, sous la direction de Karajan). A compter de 1972 et jusqu'en 1989, il devient professeur à l'Académie royale de Copenhague. Il se retire de la scène en 1980. Il a également laissé plusieurs compositions de musique de chambre, des concertos et deux symphonies. Il laisse par ailleurs deux ouvrages, un ABC pour chanteurs et ses mémoires publiées en 1992.
Kim Borg disposait d'une voix extraordinairement chaude et soyeuse avec laquelle il a abordé les grands rôles de basse comme Boris Godounov, Philippe II, Don Giovanni ou le roi Marke. Il a aussi été un grand interprète de mélodies scandinaves, de Lieder et d’œuvres religieuses. S'il a mené une carrière internationale, il est resté d'abord fidèle aux théâtres des pays scandinaves comme Copenhague, Stockholm et Helsinki. Il a laissé divers enregistrements studios mais peu de témoignages de ses grands rôles à l'opéra en version intégrale, alors que sa voix apparaît pourtant très phonogénique. Sans doute pour ces principales raisons, malgré la splendeur de sa voix, immédiatement séduisante, et une grande attention au texte, sa notoriété n'est pas restée tout à fait à la hauteur de son talent.
Il reste un témoignage de son Don Giovanni en 1956 à l'opéra de Copenhague, comme de son Pimène en allemand à Munich sous la direction d'Eugen Jochum ou en 1966 sous la direction de Karajan à Salzbourg. Il a aussi participé à un certain nombre d'enregistrements d’œuvres chorales et religieuses (Requiem de Mozart et de Verdi, Stabat mater de Dvorak, La création d'Haydn, Missa Solemnis de Beethoven ...) et à quelques intégrales réalisés en Allemagne et en allemand dans les années 1960, comme Tosca aux côtés de Sandor Konya, Faust de Gounod ou encore Le barbier de Séville avec Ernst Haefliger et Rita Streich.Mais pour apprécier pleinement la beauté de la voix, la rondeur et la fluidité de la ligne de chant, on écoutera d'abord les airs d'opéra qu'il a gravé pour Deutsche Grammophon dans les années 1959 et débuts 60. Ainsi dans l'air de Dossifei dans La Khovantschina mais aussi le monologue du roi Marke dans Tristan et Isolde, le chanteur délivre un chant d'une grande intensité et d'une grande noblesse. A l'aise avec les différentes langues, le chanteur apportait une attention au texte qui concourait encore à la force de ses interprétations. Outre les magnifiques grands airs d'opéras, on écoutera aussi tout particulièrement son interprétation saisissante et profonde des Chants et danses de la mort de Moussorgsky, orchestrés par lui-même et gravés en 1962. De même les mélodies russes de Rimsky-Korsakov ou Tchaïkovsky qu'il a laissés en 1963 sont les plus belles de la discographie avec celles laissées par le baryton Pavel Lisitsian. Il y apporte une rondeur, une vie et une élégance absolument inoubliables. Tout cela donne un aperçu de cet immense et discret talent, l'un des plus belles voix de basse du 20e siècle.
Boris Christoff
Basse bulgare (18.05.1914 - 28.06.1993)
Né dans la ville bulgare Plovdiv, ville dont l'origine remonterait à la période mycénienne, il effectue des études de droit, mais chante également comme amateur dans le chœur de la Cathédrale Alexandre Nevsky à Sofia. Il débute d'ailleurs une carrière de magistrat. Mais il continue aussi de chanter et tenir des parties solistes dans le chœur de voix d'hommes Sofia. En 1942, à l'occasion d'une grande cérémonie officielle et religieuse pour la fête de l'Epiphanie, le roi de Bulgarie Boris III, demande à entendre l'un des solistes du chœur chanter. Conquis par le chanteur, le roi l'invite à s'orienter sérieusement vers une carrière professionnelle de chanteur, à l'instar de ce que le chef du chœur avait déjà tenté en vain lui faire accepter. Le roi bulgare lui fait ensuite rapidement délivrer une bourse d'étude à Boris Christoff qui part ainsi en mai de la même année étudier en Italie. Là, il se retrouve l'élève du célèbre baryton Riccardo Stracciari. Il se produit en concert le 28 décembre 1945 à l'Académie sainte Cécile de Rome avec plusieurs airs de basse et baryton-basse, puis débute sur scène dans le rôle de Colline dans La bohème, à Reggio de Calabre. Sa carrière prend rapidement son essor à travers les théâtres d'Italie. En 1947, il incarne Pimène dans Boris Godounov à Rome et Milan puis incarne le rôle titre en 1948, en remplacement de la basse italienne Tancredi Pasero. Sa carrière se développe rapidement à partir de 1949 où il apparaît à Covent garden et au festival de Salzbourg dans le Requiem de Verdi, puis le Mai musical florentin en 1951, Barcelone en 1952, Paris en 1953, San Francisco en 1956 ou encore Chicago en 1957. En 1958 il incarne Philippe II dans une série de représentations de Don Carlo sous la direction de Carlo Maria Giulini et dans une mise en scène de Visconti restées mythiques et dont un live a été régulièrement publié en disque. La même année il participe à une autre production légendaire, La force du destin à Naples aux côtés de Tebaldi, Corelli et Bastianini, dont il existe également un témoignage audio et vidéo. Il retourne régulièrement à Covent garden mais continue également de se produire régulièrement en Italie, à la Scala de Milan. En 1964 -1965, il doit interrompre sa carrière pour se faire opérer d'une tumeur au cerveau dont il sort guéri. En 1967 il retourne pour la première fois en Bulgarie pour le décès de sa mère, alors qu'il n'y était plus autorisé depuis l'avènement du régime communiste. Il se produit ensuite de nouveau, mais de façon mois régulière, jusqu'en 1986. Après son décès, son corps est rapatrié en Bulgarie et un musée à son nom a été ouvert à Sofia.
ll a particulièrement marqué la scène lyrique internationale des années 1950/60 avec quelques grands rôles, parmi lesquels en premier Philippe II qu'il a incarné plus de 400 fois et Boris Godounov environ 300 fois. Il a par ailleurs réalisé plusieurs enregistrements tous passionnants, d'airs, opéras et mélodies particulièrement marquants et qui ont également contribué à en faire l'un des chanteurs les plus importants du 20e siècle. L'importance de Boris Christoff est d'abord due à une voix unique, d'une richesse harmonique exceptionnelle, ce qui fait qu'elle a souvent été qualifiée de bronze. Avec ce timbre somptueux, le chanteur marqua aussi par une présence dramatique immédiate et intense, un ton qui en impose dès la première note et emporte l'auditeur. Par ailleurs, il a pu défendre le répertoire russe, aussi bien quelques grands ouvrages que les mélodies, à une période où les russes eux-mêmes ont moins pu défendre leur patrimoine lyrique, avec une certaine pénurie de grandes voix et un repli sur le bloc de l'Est.
On ne peut donc passer à côté de ses deux enregistrements de Boris Godounov, sous la direction d'Issay Dobrowen en 1952 ou d'André Cluytens en 1962, mais aussi celui d'Une vie pour le Tsar dirigé par Markevitch en 1957. Il est dommage qu'il n'ait pu graver le rôle de Dossifei dans La Khovantschina, mais le monologue de l'acte 5 enregistré en 1950 donne un magnifique aperçu. Il a laissé l'enregistrement de divers airs d'opéras russes et italiens ainsi qu'une importante anthologie de mélodies russes, tous incontournables. Outre ses enregistrements studios de Philippe II et Ramfis dans Aida, et parmi diverses live dans différents rôles, ses incarnations dans Don Carlo à Londres et dans La force du destin en 1958 sont essentielles.
site internet musée Boris Christoff
Enzo Dara
Basse italienne (13.10.1938 - 25.08.2017)
Il naît à Mantoue dans une famille modeste mais passionnée par l'opéra, son grand-père ayant été contrebassiste professionnel. Il prend des cours de chant à Mantoue auprès de Bruno Stuffi et débute en 1960 dans le rôle de Colline dans La bohème au théâtre de Fano (près de Pesaro). Il enchaîne pendant quelques années des rôles de basse classiques comme Monterone dans Rigoletto, Timur dans Turdandot et même Ramfis dans Aida, puis se produit à Reggio Emilia dans Le barbier de Séville de Rossini et l'elixir d'amour de Donizetti en 1967, marquant ses débuts dans ce répertoire qui l'attirait déjà lors de ses études et dans lequel il va faire carrière. Mais c'est en 1971 qu'il fait la rencontre décisive de Claudio Abbado pour une production du Barbier de Séville à la Scala de Milan. Il y chante le rôle de Bartolo qui sera l'un de ses grands rôles sur les presque trente ans qui suivront. Il retrouvera régulièrement Abbado, chef avec lequel il a le plus souvent chanté. Sa carrière prend ainsi un essor important, le conduisant sur toutes les grandes scènes internationales. Il se produit ainsi à l'Opéra de Vienne, à Covent garden à Londres, au Metropolitan opera de New-York, à l'Opéra de Paris, mais encore à Munich, Berlin ou Hong-Kong. Il s'est en effet imposé comme la basse bouffe italienne majeure de la scène internationale. Le chanteur porte en effet depuis sa formation un intérêt particulier pour ces rôles des opéras de Rossini ou Donizetti dans lesquels il voit une filiation directe avec la commedia dell arte et un intérêt particulier sur le plan théâtral. Il participe en 1972 au premier film opéra réalisé par Jean-Pierre Ponnelle, une nouvelle fois Le barbier de Séville avec Claudio Abbado. Il interprète ainsi au cours de sa carrière plus de 400 fois ce rôle de Bartolo. Au cours des années 1990, Enzo Dara réalise quelques mise en scène aussi bien à Bologne, Turin qu'au festival Donizetti de Bergame. Il se retire de la scène comme chanteur à la fin des années 1990. En 1994 il publie également un livre qui se présente comme un divertissement autour de son métier, puis en 2004 un second ouvrage sur ses rencontres avec divers chanteurs d'opéras. Au début des années 2000, il lance par ailleurs un "laboratoire de musique et théâtre" au sein du conservatoire de Mantoue afin d'aider les jeunes chanteurs à débuter leur carrière et présenter des ouvrages méconnus du répertoire bouffe auquel il tient tout particulièrement.
Il a été l'un des grands artisans du renouveau du répertoire rossinien au cours de ces années 70 et 80, sachant allier comme aucun autre le sens de la comédie et du théâtre à un style exemplaire. Il disposait d'une voix chaude, avec une tessiture plus proche du baryton-basse et un vibrato très serré. Son sens comique irrésistible transparaît dans ses enregistrements audio qu'ils soient en live ou en studio, mais avec une musicalité infaillible et un grand respect de la partition. En outre, il sait faire preuve d'une dextérité et d'une vélocité inégalées, grâce à une maîtrise exceptionnelle du "sillabato", cette capacité à chanter une strophe très articulée à un tempo effréné. On pourra ainsi écouter plus particulièrement l'air de Don Magnifico au 2e acte de La Cenerentola, très véloce et constamment parfaitement timbré dans l'enregistrement réalisé sous la direction de Gabriele Ferro au début des années 80, ou encore plus prestissimo, quoiqu'un peu moins chaleureusement timbré, dans l'enregistrement réalisé avec Riccardo Chailly en 1992. Dans les deux cas la technicité pour permettre de chanter cet air avec une articulation aussi rapide et parfaite, sans que ce soit au détriment du chant, est vraiment incroyable. On en trouve évidemment un second exemple dans son autre rôle emblématique, Bartolo dans Le barbier de Séville. Et dans le live réalisé à Turin en 1987, sous la direction de Bruno Campanella, on perçoit combien le résultat sur scène est identique et tout aussi extraordinaire.
Ces qualités de timbre, d'une technicité hors norme et d'un sens de la comédie rare à l'opéra ont fait du chanteur le modèle parfait et insurpassable de la basse bouffe italienne.
Gottlob Frick
Basse allemande (28.07.1906 - 18.08.1994)
Né à Ölbrunn (Bade-Wurtermberg) près de Karlsruhe, au sein d'une famille de 13 enfants, ses talents de chanteur se révèlent un peu par hasard. Mais il entre dans les années 20 à l'opéra de Stuttgart dans le chœur. Il reçoit néanmoins au conservatoire la formation notamment de Fritz Windgassen, le père du ténor wagnérien. Il débute sa carrière de soliste en 1934 à Cobourg en Bavière et enchaîne divers rôles à Fribourg et Königsberg, avant d'être invité en 1941 par Karl Böhm à rejoindre l'Opéra de Dresde. Il y demeure ne dizaine d'années avant de partir pour la troupe de la Deutsche Oper de Berlin au début des années 1950 puis l'Opéra de Munich en 1954. C'est à partir de ce moment que sa carrière prend toute son ampleur. Il est alors invité à Hambourg, au festival d’Édimbourg, Covent garden à Londres, le Metropolitan Opera, l'Opéra de Vienne, les festivals de Salzbourg et Bayreuth.
Au cours des décennies 50 et 60 il devient ainsi l'un des basses profondes les plus importantes, en particulier pour les grands rôles du répertoire germanique. Ses grands rôles sont Osmin dans l'Enlèvement au Sérail, rôle qu'il enregistre deux fois, Sarastro dans La flute enchantée qu'il enregistre avec Klemperer dans une version de référence, les basses wagnériennes Hagen, le roi Marke, le Landgraf Hermann ou Gurnemanz. Mais il aborde également les rôles de basses dans le répertoire romantique allemand, de Rocco dans Fidelio aux opéras de Nicolai, Flotow, Lortzing ou Cornelius. Il reste ainsi un Kaspar marquant dans Le Freischütz de Weber. Il aborde aussi le répertoire italien, mais souvent en laissant des témoignages en langue allemande, ainsi que l'oratorio. Il met fin à sa carrière en 1970, mais continue à apparaître jusqu'en 1985 occasionnellement comme ce roi Marke à Stuttgart en 1973 sous la direction de Carlos Kleiber.
Il laisse de nombreux enregistrements d'airs et d'opéras en intégrale, outre divers live à Bayreuth, Salzbourg Londres ou New-York qui permettent de disposer d'une large documentation de ses incarnations.
Avec cette voix très profonde et grave, très impressionnante, souvent qualifiée de caverneuse, ses incarnations sont particulièrement saisissantes. Son chant était capable également de beaucoup de rondeur et de chaleur, lui permettant d'incarner des superbes et émouvants Sarastro (intégrale avec Klemperer ou cette magnifique version de l'air du 2e acte gravée en 1954) et roi Marke (d'abord dans le live à Hambourg en 1949 dirigé par Schmidt-Isserstedt). Ses incarnations de Hagen restent légendaires, aussi bien à Bayreuth dans le Ring dirigé par Kempe au début des années 1960 que le fameux enregistrement studio de Solti pour Decca. On n'oubliera enfin pas non plus ses fameux Rocco avec Furtwängler ou Fricsay.
site interet Gottlob Frick Gesellschaft
Josef Greindl
Basse allemande (23.12.1912 - 16.04.1993)
Il étudie à l'université de musique et des arts de sa ville natale, Munich, jusqu'en 1936, l'année de ses débuts à Krefeld. Il se produit déjà dans l'un des rôles qu'il retrouvera tout au long de sa carrière, celui d'Hunding dans la Walkyrie. Il quitte cette troupe pour rejoindre en 1938 celle de l'Opéra de Düsseldorf puis en 1942 celle de la Staatsoper de Berlin, remarqué par Heinz Tietjen son directeur. Ce dernier, par ailleurs directeur artistique des sombres années du festival de Bayreuth, permet à Greindl de débuter dès 1943 dans le rôle de Pogner dans Les maîtres chanteurs de Nuremberg sous la direction de Furtwängler. Après guerre il poursuit sa carrière en rejoignant en 1948 la troupe de la Deutsche Oper à Berlin (encore dénommée Städtische Oper), et participer aux festivals de Salzbourg dès 1949 et Bayreuth à compter de 1952. Il va également se produire à New-York, Chicago, Milan ou Londres et intègre également la troupe de l'Opéra de Vienne en 1956. Mais il demeure avant l'un ds piliers essentiels du festival de Bayreuth jusqu'en 1969, y incarnant tous les principaux rôles de basses, faisant du chanteur l'un des grands figures du Neues Bayreuth sous l'égide des frères Wieland et Wolfgang Wagner. Jusqu'en 1973, il apparaît encore dans quelques créations mondiales puis se consacre à l'enseignement à la Hochschule für Musik de Vienne. En 1981 il fait une dernière apparition dans Arabella de Strauss.
Avec une voix sombre et noire, on associe largement le chanteur aux rôles d'Hunding et Hagen dans la Tétralogie puisqu'il en été le principal interprète à Bayreuth
pendant vingt ans. ll a en effet marqué ces rôles avec un timbre d’airain et une carcatérisation forte, marquée par une violence noire et froide mais toujours un grand respect du chant et du
texte. Il a pourtant su également être un roi Henri, un roi Marke ou un Landgrave dans Tannhäuser particulièrement bienveillants et musicalement chaleureux. De même il fut un grand
Sarastro aux graves abyssaux, son timbre lui donnant une dimension intransigeante mais également humaine et paternelle. Pour s'en convaincre, on peut écouter ses témoignages en studio avec
Friscay ou plus phénoménal encore en live avec Furtwängler à Salzbourg en 1951. Avec une carrière fortement marquée par le répertoire wagnérien, Greindl a aussi inscrit à son répertoire le rôle
de Gurnemanz, avec une approche conférant au personnage un mélange très intéressant de fanatisme dans le ton tranchant alternant avec une bienveillance se dégageant de certaines phrases adoucies.
On l'écoutera volontiers en priorité à Bayreuth en 1954, très en voix, ou en 1957 sous la direction légendaire et fascinante de Knappertsbusch.
Enfin, hormis ses différentes incarnations wagnériennes essentielles, on pourra également écouter son enregistrement inattendu du cycle de Lieder Le voyage d'hiver de Schubert réalisé en 1957. Cela témoigne de ses grandes qualités de conteur, avec une grande attention au texte, aux nuances, à la ligne de chant. Cet enregistrement personnel sait emmener l'auditeur dans une vision assez sombre mais juste et passionnante du cycle schubertien.
Nicolaï Ghiaurov
Basse bulgare naturalisée italienne (13.09.1929 - 2.06.2004)
Né à Lydyene, près de Velingra, son père travaille à l'usine et est également sacristain. Il chante dans le chœur de l'église comme "soprano colorature" comme il l'a dit ensuite. Mais il apprend plutôt le violon, la clarinette et la trompette. Adolescent il est par ailleurs davantage intéressé par le théâtre et joue dans des spectacles amateurs. Il part faire son service militaire où il dirige le chœur et se met alors à chanter quelques parties, ce qui attire l'attention de l'un de ses camarades officiers chantant dans le chœur. Par son intermédiaire, Nicolai Ghiaurov rencontre le baryton Christo Brambarov qui enseigne également à l'Académie de musique de Sofia, sans que cette rencontre soit tout à fait concluante sur le moment. Mais il rentre à l'Académie de Sofia où le baryton devient effectivement son professeur près de deux ans. Il part ensuite étudier au conservatoire de Moscou pendant cinq années, de 1950 à 1955. A l'issue il lui est proposé d'intégrer la troupe du Bolchoï à Moscou. Mais il doit quitter Moscou et passe quelques temps à Varsovie où il remporte un concours de chant, avant de devoir revenir en Bulgarie à la demande de l’État bulgare. Il débute à l'Opéra de Sofia en septembre 1955 avec le rôle de Basilio dans Le barbier de Séville de Rossini et y devient basse principale. Puis il est engagé en 1957 à l'Opéra de Vienne où il fait ses débuts dans Aida. Il poursuit sa carrière internationale en débutant à la Scala de Milan et au Bochoï lors de la saison 1958/59. Il s'établit en Italie en 1959 En 1962 il est invité à Covent Garden à Londres, en 1963 à l'Opéra de Paris dans le rôle de Philippe II et à Chicago dans Faust, en 1965 au Metropolitan de New-York, également dans Faust de Gounod. De 1961 à 1964 il participe au festival de Vérone puis apparaît à Salzbourg de 1964 à 66 dans Boris Godounov sous la direction de Karajan. Il va se produire ainsi sur les grandes scènes internationales, régulièrement présent à la Scala de Milan et à l'Opéra de Vienne au cours des années 1970 aux années 90. Il participe notamment aux célèbres représentations de Simon Boccanegra dirigés par Abbado et mis en scène par Strehler en 1971/72. Il chante une dernière fois à Sofia en 2000 lors d'un concert de gala et fait ses adieux à la scène en janvier 2004 à la Fenice de Venise dans son rôle des débuts, Basilio du Barbier de Séville. Il était marié en seconde noce à la soprano Mirella Freni avec qui il se produira régulièrement et effectué plusieurs enregistrements.
Avec une voix imposante, alliant puissance, souplesse, un timbre somptueux, un grand sens des nuances et une forte personnalité pour caractériser les rôles, le chanteur s'est imposé comme une basse les plus importantes de la seconde moitié du 20e siècle, abordant tous les rôles de basse des répertoires italiens, français et russe. Il a en particulier laissé exceptionnels Philippe II et un Boris Godounov en live et en studio. Mais sa discographie très riche et vaste permet de l'écouter dans la plupart des rôles de basse verdiens ainsi que dans Boris Godounov en live à plusieurs reprises et en studio à par deux fois (avec Karajan en 1970 pour Decca et Tchakarov en 1986 pour Sony). On peut encore le retrouver notamment dans Ivan Khovansky dans La Khovantchina de Moussorgsky, Don Giovanni, Mephistopheles dans Faust de Gounod ou dans l'ouvrage Mefistofele de Boito. Il laisse également plusieurs récitals d'airs d'opéras. Même si dans les enregistrements de la fin des années 80 et des années 90, l'aigu est moins aisé, chacune de ses incarnations au sein de cette importante discographie, est exceptionnelle. L'un de ses plus grands témoignages reste son Philippe II, au sommet de son art, vraiment impérial mais sachant faire entrevoir des fragilités, à l'Opéra de Vienne en octobre 1970, largement diffusé et aujourd'hui publié par Orfeo.
Hans Hotter
Basse allemande (19.01.1919 - 6.12.2003)
Né à Offenbach sur le Main, à proximité de Francfort, il y étudie l'orgue et le piano et chante dans la chorale de l'église. C'est ensuite à Munich qu'il entre au conservatoire pour y étudier l'harmonie, la direction d'orchestre puis le chant avec le ténor Matthäus Römer qui avait incarné Parsifal à Bayreuth au début du siècle. Il suit également des cours auprès du grand baryton Rudolf Bockelmann. Il débute en concert en 1929 dans le Messie d’ Haendel à Munich et sur scène en 1930 au théâtre d'Opava (alors nommée Troppau) en Tchéquie avec le rôle de l'Orateur dans La flûte enchantée, rôle qu'il reprendra à différentes reprises dans sa carrière. Il apparaît ensuite dans la troupe de l'Opéra de Wroclaw (alors Breslau) avant de rejoindre celle de l'Opéra allemand de Prague entre 1932 et 1934, puis l'Opéra de Hambourg de 1934 à 1937. Il débute en 1937 à l'Opéra de Munich, à nouveau dans le rôle de l'Orateur de la Flûte enchantée et en 1939 à l'Opéra de Vienne, dans le rôle de Jochanaan dans Salomé de Richard Strauss. Ce dernier, comme le chef Clemens Krauss apprécient le chanteur et le célèbre compositeur lui confie la création de deux nouveaux rôles (dans Friedenstag et Capriccio). En 1942 il fait également ses débuts au festival de Salzbourg dans le Conte des Noces de Figaro de Mozart. En revanche, dans le contexte d'une relation tendue avec lé régime nazi, il refuse de se produire à Bayreuth dans cette période. Disposant déjà d'une grande notoriété, c'est cependant à la sortie de la guerre que sa carrière va prendre une dimension internationale. Il va en effet apparaître à New-York et à Londres, et faire enfin ses grands débuts au festival de Bayreuth à partir de 1952, à l'époque du Neues Bayreuth. Il en devient alors l'un des piliers en y chantant chaque année jusqu'en 1966. Il devient alors, et pour toujours, le grand Wotan dans la Tétralogie et le grand Gurnemanz dans Parsifal. Il reste également régulièrement présent sur les scènes de la Scala de Milan, de Covent Garden à Londres et de l'Opéra de Vienne tout particulièrement dans ses grands rôles wagnériens ou de Strauss. Il se produit également un peu partout dans le monde, que ce soit à Mexico, Barcelone, Bruxelles, Monte Carlo ou même en Australie. Il se lance également dans la mise en scène, comme avec le Ring à Londres entre 1961 et 1964 ou quelques ouvrages à Hambourg.
Il fait ses adieux à la scène en 1972 mais se produit encore à différentes reprises sur scène jusque dans les années 1990, dans l'Orateur de la Flûte enchantée, Schigolch dans Lulu de Berg ainsi que que dans les Gurrielieder de Schoenberg comme récitant à Salzbourg en 1996 avec Claudio Abbado). Au gré de masterclasses il chante également parfois quelques Lieder dont il a été l'un des plus grands spécialistes.
Hans Hotter a laissé une discographie importante en live et studio, permettant d'écouter ses différentes incarnations tout au long de sa longue carrière, à l'opéra et dans le répertoire du Lied. On conserve ainsi une bonne documentation de celui qui reste le plus grand Wotan à ce jour, mythique, ainsi que l'interprète immense de cycles de mélodies de Schubert pour l'éternité. Il a ainsi enregistré à quatre reprises le Voyage d'hiver de Schubert, la version gravée en 1955 avec Gerald Moore constituant une référence absolue. Sa voix profonde, sa présence sur scène, l'intelligence de sa diction et de la déclamation chantée du texte demeurent exceptionnels. Il laisse ainsi des interprétations et enregistrements entrés dans la légende, d'une intensité et d'une profondeur uniques, en particulier les Lieder de Schubert et dans la cantate Ich habe genug BWV82 de J.S Bach. Dans ce rôle qu'il a marqué à jamais de Wotan, parmi les nombreux versions existantes, dont celui en studio avec Solti, on privilégiera les live à Bayreuth, en 1953 avec Clemens Krauss, en 1955 avec Joseph Keilberth et en 1957 avec Hans Knappertsbusch. Toute la complexité du rôle est appréhendée dans ces incarnations insurpassables, le chanteur alliant la plus grande noblesse et autorité avec la déchirure la plus émouvante venant des contradictions internes du dieu.
Alexander Kipnis
Basse ukrainienne, naturalisée américaine (01.02.1891 - 14.05.1978)
Il naît dans une famille assez démunie de la ville d'Ukraine Jytomir qui compte alors environ 70 000 habitants. Avec un père qui décède lorsqu'il n'a que douze ans, il devient apprenti charpentier mais chante également dans la chorale de la synagogue locale. Il entre finalement au conservatoire à l'âge de 19 ans pour y étudier divers instruments et la direction d'orchestre. Il en sort pour intégrer l'armée comme chef d'orchestre et continue de chanter. Il part alors prendre des cours de chant à Berlin auprès du, alors, très réputé professeur Ernst Grenzebach. Il chante pendant ce temps de petits rôles dans des opérettes à Berlin. Lorsque la Première guerre mondiale éclate, il est fait prisonnier dans un camp où le commandant remarque sa voix et le fait auditionner par son frère, directeur de de l'Opéra de Wiesbaden. Ce dernier le fait débuter dès 1915 à Hambourg puis Kipnis rejoint la troupe de Wiesbaden de 1917 à 1922. Il aborde alors une grande partie des grands rôles de basses comme Sarastro dans La flûte enchantée, Rocco dans Fidelio, Gurnemanz dans Parsifal, ou encore Hagen dans Le crépuscule des dieux. Il part ensuite pour la troupe de l'opéra Charlottenburg de Berlin où il demeure jusqu'en 1930. Sa carrière prend une dimension internationale puisqu'il se produit régulièrement à Chicago entre 1923 et 1932, ainsi qu'aux festivals de Bayreuth jusqu'en 1933 et Salzbourg jusqu’en 1937. Il est également invité à Buenos Aires, à Covent Garden à Londres. Il rejoint la Staatsoper de Berlin entre et 1935 et part pour l'Opéra de Vienne entre 1935 et 1938, fuyant la montée du nazisme, ce qui l'amène ensuite à poursuivre sa carrière aux Etats-Unis, dont il est ressortissant depuis 1931. Il se retire du Metropolitan de New-York et de la scène en 1946 mais donne des concerts et récitals jusqu'en 1951. Il enseigne ensuite au College of music à New-York, (conservatoire entre 1878 et 1968).
Au cours de sa carrière il a abordé environ 80 rôles différents, parfois dans plusieurs langues, s'est produit sur toutes les grands scènes à travers le monde et s'est imposé comme l'une des plus grandes basses non seulement de son époque, rencontrant un grand succès, mais aussi de tout le 20e siècle. Outre les grands rôles wagnériens, il a marqué l'histoire de l'opéra par son interprétation marquante du rôle de Boris Godounov. Il a aussi donné de nombreux Lieder et mélodies. Outre divers enregistrements en studio d'airs et Lieder à différents stades de sa carrière et ce dès 1916, on peut le retrouver dans une quinzaine de rôles sur une vingtaine d'enregistrements live au son malheureusement souvent assez précaire.
Il disposait en effet d'une superbe voix profonde, puissante et très expressive. Le chanteur était capable d'incarner une palette de personnages très variée, des rôles comiques comme Leporello ou Varlaam aux rôles les plus tragiques dont son célèbre Boris Godounov ou les plus profonds comme Sarastro ou Gurnemanz. Il y témoigne à chaque fois d'une grande palette de nuances, d'une présence vocale exceptionnelle et d'une capacité de caractérisation particulièrement intense. Pour prendre la mesure de son talent, outre un vrai don pour les langues, on écoutera volontiers son interprétation gravée en 1923 à Berlin, en italien, du grand air de Philippe II dans Don Carlo de Verdi. La profondeur de la voix, la richesse du timbre, le sens des nuances en font un moment exceptionnel. Et puis il y a avant tout ces extraits plus tardifs du rôle de Boris Godounov, en russe, enregistrés en studio à New York en 1945. Avec cette voix tellement impressionnante, il offre, par une intensité dramatique particulière, toute la contradiction d'un tsar à la fois tyrannique et torturé. ll laisse ici une incarnation de légende jamais surpassée.
Ezio Pinza
Basse italienne (18.05.1892 - 9.05.1957)
De son vrai prénom Fortunato, le chanteur est né à Rome dans une famille modeste. Il passe son enfance à Ravenne et se passionne pour le vélo, se destinant à une carrière cycliste. Mais il étudie le chant aux conservatoires de Ravenne puis de Bologne. Il fait alors ses débuts dans le rôle d'Oroveso dans Norma de Bellini à Soncino, dans la province de Crémone en 1914. Il est mobilisé dans les Dolomites lors de la Première Guerre mondiale, interrompant ainsi sa carrière jusqu'en 1919. Il retourne alors sur scène à Florence puis à compter de janvier 1920 au Teatro Costanzi à Rome (dans La force du destin) où il aborde divers rôles dans La Gioconda, La force du destin, Aida, ou encore dans Tristan et Isolde durant deux saisons. Il y retournera une fois pour une série de représentations de Mefistofele en 1936 sous la direction de Tullio Serafin. Il apparaît également dans ce début des années 1920 à Turin, de nouveau dans Norma, ou à Naples dans le rôle titre Mefistofele de Boito. Le chef Arturo Toscanini, alors directeur artistique à la Scala de Milan, le remarque et l'invite à y participer à une série de représentations de Boris Godounov, dans le rôle de Pimène en février 1922 puis des Maitres chanteurs de Nuremberg, dans le rôle de Pogner, en avril 1922. Il se produit alors pendant deux années régulièrement à la Scala de Milan, dans Lohengrin et Tristan et Isolde de Wagner, Louise de Charpentier, La Bohème de Puccini, le requiem de Verdi. Il poursuit ensuite sa carrière en Italie et en Allemagne, puis fait ses débuts au Metropolitan Opera de New-York, dans La vestale de Spontini, aux côtés de la soprano Rosa Ponselle. C'est le début d'une longue carrière au Met où il se produit pendant 22 années, dans plus de 700 représentations, dans une cinquantaine de rôles et y gagne une énorme célébrité. Il y aborde un nombre important de rôles du répertoire italien et français. Il marque aussi la scène new-yorkaise avec son Don Giovanni de légende. Dans les années 1930, il apparaît également à Covent Garden à Londres, à l'opéra de Vienne, à Florence, Buenos Aires, Chicago ainsi qu'au festival de Salzbourg.
En 1948, il quitte la scène lyrique et entame une seconde carrière dans la comédie musicale à Broadway, avec de nouveaux débuts dans South Pacific de
Richard Rogers et Oscar Hammertein. Il participe également à la comédie musicale Fanny de Harold Rome en 1954. Dans cette période, il participe à une série TV de la NBC intitulée
Bonino, ainsi qu'à plusieurs films dont un biopic sur la célèbre basse russe Fedor Chaliapine.
Si sa participation à des comédies musicales à Broadway ont à l'époque encore accru sa célébrité aux Etats-Unis, c'est pour sa carrière à l'opéra que le chanteur est resté comme l'une des plus grandes basses du 2e siècle et l'un des deux plus grands Don Giovanni avec Cesare Siepi quelques années plus tard. On garde en effet aujourd'hui la trace de ses incarnartions dans des récitals d'airs d'opéras gravés en studio et dans le requiem de Verdi enregistré à deux reprise, en 1929 sous la direction de Carlo Sabajno et en 1939 sous la direction de Tullio Serafin. Mais on peut aussi le retrouver dans quelques témoignages live provenant du Met, en particulier dans ses grands rôles, Don Giovanni (1937, 1942, 1943 et 1944), Boris Godounov (1939) Fiesco dans Simon Boccanegra (1939) et Ramfis dans Aida (1937), La force du destin (1943) et Les noces de Figaro (1940). On peut ainsi largement admirer la splendeur de la voix, d'une grande souplesse, mais ample et imprimant une autorité immédiate. Son Don Giovanni à Salzbourg en 1937 ou à New-York en 1942 sous la direction de Bruno Walter est devenu légendaire, tant l'insolence vocale et scénique du personnage sont exceptionnelles et insurpassées. Mais peut-être plus encore, on écoutera en tout premier lieu son enregistrement de la scène finale de l'acte 2 de La force du destin, avec Rosa Ponselle en 1928 à New-York. C'est la rencontre de deux chanteurs uniques qui offrent un moment d'opéra inégalable et pour l'éternité.
Samuel Ramey
Basse américaine (né le 28.03.1942)
Né à Colby dans le Kansas, il y suit l'école jusqu'à ses 18 ans. Il commence à y apprendre le chant et poursuit des études musicales à l'Université d’État du Kansas
et à l'école de musique de l'université de Wichita se destinant à devenir professeur de musique. Mais il est incité à se tourner vers une carrière de chanteur professionnel et il se perfectionne
à l'Opéra de Santa Fé, puis à New-York auprès d'Armen Boyajian. Ce dernier lui fait reprendre le travail du début, avec de nombreux exercices vocaux pendant de longs mois puis il permet à Samuel
Ramey de débuter dans Mephistopheles de Faut dans le New-Jersey. En 1973 il effectue ses vrais débuts dans Carmen, avec le rôle de Zuniga au New York City Opera (où brille alors Beverly
Sills, mais qui a fait faillite en 2013) où il incarne ensuite divers rôles dont Basilio dans Le barbier de Séville de Rossini. Il participe, aux côtés de Beverly Sills, à des
représentations de Lucia di Lammermoor de Donizetti durant la saison 1974/75, en tournée à Omaha et Milwaukee. Il fait ses débuts dans Les noces de Figaro au festival de Glyndebourne. Sa
carrière prend alors un essor important en Europe et au niveau mondial. Il apparaît à l'Opéra de Paris avec le rôle de Colline dans La Bohème en 1979, pour y retourner dans divers rôles
jusqu'en 2008. Il apparaît à Covent Garden à Londres à partir de 1982, il fait ses débuts avec Ricardo Muti à la Scala de Milan dans Les noces de Figaro. Il apparaît pour la première fois au
Metropolitan Opera de New-York dans Rinaldo d’Haendel en 1984, grâce à l'appui de Marylin Horne, et après avoir renoncé précédemment à s'y produire dans de plus petits rôles. Au cours
des années 1980 et 1990, il apparaît sur toutes les grande scènes internationales, notamment dans les rôles de basse chez Rossini et dans les trois Mephisto de Gounod, Boito et Berlioz. Il
participe du renouveau Rossini et chante à plusieurs reprises au festival Pesaro, comme en 1984 dans la célèbre résurrection du Voyage à Reims sous la direction d'Abbado, ou avec
Maometto Secondo en 1985. On le retrouve également au Festival de Salzbourg en 1987 dans un célèbre Don Giovanni dirigé par Karajan. Il aborde un large répertoire marqué par les
grands rôles comme Philippe II, Pimène puis Boris Godounov, Attila ou encore Scarpia dans Tosca. Mais c'est Mephistopheles dans le Faust de Gounod qui restera son premier rôle avec plus
de 250 représentations. Si le chanteur n'aborde plus aujourd'hui les mêmes grands rôles à la scène, il apparaît encore ponctuellement dans certaines productions, comme dans Eugène
Onéguine à Santa Barbara en mars 2019 ou dans Samson et Dalila à Berlin avec Barenboim fin 2019.
Sa discographie est assez fournie et permet de l'écouter dans la plupart de ses incarnations majeures et dans divers récitals. Son récital chez Naxos intitulé A date with a devil, enregistré en 2000, lui permet ainsi de confronter ses différentes incarnations de Mephisto qui furent si importantes dans sa carrière. On le retrouve dans nombre d'opéras en intégrale de Rossini, comme Le turc en Italie dirigé par Riccardo Chailly, Semiramis dirigé par Ion Marin, Le voyage à Reims avec Abbado (par deux fois), et bien sûr dans Le barbier de Séville par trois fois (avec R.Chailly, J.Lopez-Cobos de préférence ou avec G.L Gelmetti). Son Scarpia avec Sinopoli, dur et glaçant, est une incarnation importante du personnage dans la discographie. Son interprétation de Mefistofele de Boito constitue également l'une des grands interprétations du rôle, soit avec Riccardo Muti à la Scala de Milan en 1986 ou dirigé par Patanè en 1988 pour Sony. Mais il faut aussi vraiment écouter cet Attila ravageur et royal avec Muti à la Scala de Milan et son Maometto Secondo enregistré en 1985 avec Claudio Scimone où l'on peut admirer toute son autorité et son agilité exceptionnelle.
Avec une voix à la fois assez minérale, profonde et ronde, aux reflets cuivrés, alliées à une agilité et une souplesse uniques, le chanteur a ainsi fortement marqué le répertoire français et italien de son empreinte. Il demeure pour longtemps la grande basse rossinienne de référence.
le site internet à son nom est en fait celui d'un homonyme.
Mark Reizen
Basse ukrainienne (3.07.1895 - 25.11.1992)
Il naît à Zaitsevo, dans le bassin houiller du Donbass, au sein d'une famille dans laquelle le père travaille pour une mine. Enfant il apprend à jouer divers instruments comme la mandoline, la guitare et la balalaka. Mais il se destine à des études d'ingénieur qu'il entreprend après la guerre pour laquelle il fut mobilisé. Dans le même temps il étudie le chant au conservatoire de Kharkiv (Kharkov), créé en 1917, puis avec Feredico Bugamelli. Il fait ses débuts sur scène en 1921 dans le l'opéra de la même ville, avec le rôle de Pimène dans Boris Godounov. Il s'y produit ensuite dans Eugène Onéguine et Mazeppa de Tchaikovsky, Faust de Gounod ouencore Le demon de Rubinstein. En 1925, il rejoint la troupe du Théâtre Mariinsky de Saint Petersbourg. En 1928 il y fait ses débuts dans Boris Godounov et aborde au cours de ces années la plupart de ses grands rôles dont Dossifei dans La Kovantchina, Salieri dans Mozart et Salieri de Rimsky-Korsakov ou Ivna Sousassine dans Une vie pour le tsar de Glinka. Il participe à une tournée en Europe en 1929/1930 passant par Berlin, Paris, Londres et Monte Carlo. En 1930, il rejoint la troupe du Bolchoï à Moscou où il reste jusqu'en 1954. Il y apparaît dans tous ses plus grands rôles du répertoire russe mais également dans Wotan dans la Tétralogie ou dans Philippe II du Don Carlo de Verdi. Pendant la Deuxième Guerre mondiale, il chante pour les soldats et donne un concert spécial en 1941 dans une station de metro dans Moscou assiégé. En 1945 il donne un concert au Kremlin pour la victoire soviétique. Après son retrait du Bolchoï, il continue de chanter et se produit dans quelque villes du bloc de l'Est comme Dresde, Budapest ou Berlin. En 1967 il devient professeur de chant à la réputée Académie russe de musique Gnessine de Moscou. Il donne à nouveau un récital pour ses 80 ans et apparaît une dernière fois au Bolchoï en 1985, à 90 ans donc, avec un incroyable air du Prince Grémine dans Eugène Onéguine et dont il reste le témoignage video.
Il disposait d'une voix phénoménale, en ampleur, en richesse harmonique, en étendue vocale, avec des graves abyssaux et de solides aigus. Une série d'airs d'opéras du répertoire russe, italien et français enregistrés à la fin de sa carrière, ainsi que plusieurs intégrales réalisées à la fin des années 1940, permettent d'imagnier ce qu'a dû être le chanteur sur scène. On peut en effet l'écouter aussi bien dans Boris Godounov que La Kovantschina par deux fois, dans le Prince Igor, Mozart et Salieri et même dans une intégrale de Faust de Gounod chanté en russe aux côtés de Kozlovsky en 1948. On peut aussi l'entendre dans des mélodies russes gravées en studio ou parfois disponibles sur internet en video. A chaque fois on est totalement sidéré par la dimension et la qualité hors norme de cette voix unique. Chaque air et chaque incaration sont à écouter et s'évèrent indispensables. En priorité on peut commender par l'air du Vking dans l'enregistrement intégral de Sadko sous la direction de Golovanov en 1952 et par l'air de Grémine gravé en 1948. L'ampleur de la voix, le timbre, le souffle, les graves sont véritablement titanesques. Et bien sûr ses témoignages dans le rôle de Dossifei dans la Khovantschina et dans le rôle titre de Boris Godounov sont des inarnations inégalées sinon par Kipnis dans Boris.
Si Mark Reizen a conduit une carrière essentiellement centrée sur l'Union soviétique, lui conférant une notoriété internationale moindre, il apparaît bien aujourd'hui comme la voix de basse dotée des qualités les plus sidérantes du 20e siècle.
Matti Salminen
Basse finlandaise (né le 7.07.1945)
Il naît à Turku dans une famille amateur de musique et participant à une chorale dans laquelle il entre également à l'âge de six ans. A 15 ans il apprend vraiment le chant auprès de la soprano et professeure finlandaise Lea Piltti (1904-1982), puis entre à l'Académie Sibelius de l'université des arts d'Helsinki (SiBa) fondée en 1882, école qui formera tous les grands artistes finlandais. Pendant ses études, il gagne de l'argent en se produisant des tangos finlandais sous le pseudonyme Esa Pesa. Il hésite sur le genre musical dans lequel tenter une carrière professionnelle, entre classique ou musiques actuelles. A l'âge de 17 ans il participe à la présentation d'un opéra finlandais au sein d'une troupe amateur qui l'incite à vouloir se lancer dans la carrière de chanteur lyrique. Il se perfectionne en Italie, à Rome, et en Allemagne, à Düsseldorf. C'est en 1966 qu'il fait ses débuts professionnels, après une audition à l'opéra d'Helsinki, mais pour entrer dans le chœur de l'Opéra national finlandais. Sa voix, encore claire, trouve difficilement à se faire remarquer. Mais finalement, en 1969, la chance se présente lorsqu'il est appelé à remplacer la basse malade qui tenait le rôle de Philippe II dans Don Carlo de Verdi. Il y est remarqué et finit par rejoindre, trois ans plus tard, en 1972, la troupe de l'opéra de Cologne où il demeure jusqu'en 1980. Pour le chanteur, cette période aura été décisive pour la suite de sa carrière. Il y aborde d'abord de petits rôles puis peu à peu les rôles plus importants, lui permettant d'apprendre le répertoire, l'allemand et se perfectionner pour ce métier. Il se produit désormais régulièrement à Zurich et à la Deustche Oper à Berlin. Il débute en effet en 1972 à l'opéra de de Zurich, auquel il est très attaché, avec Sarastro dans La flûte enchantée puis y apparaît régulièrement jusqu'à un concert d'adieux en novembre 2016. La consécration internationale vient avec ses débuts au Festival de Bayreuth en 1976, notamment avec le fameux Ring de Chereau et Boulez. Il y retournera jusqu'en 1988, abordant les grands rôles de basses wagnériens dont un inoubliable roi Marke dans Tristan et Isolde, alors dirigé par Barenboim et mis en scène par Ponnelle, disponible en vidéo. En 1981 il débute au Metropolitan opera de New-York, dans ce même rôle qu'il affectionne particulièrement. Il s'y produira dans plus d'un centaine de représentations, jusqu'en 2008. Sa carrière le mène sur toutes les grandes scènes internationales, Covent Garden à Londres, Paris (Théâtre des Champs-Elysées et Châtelet), Scala de Milan, encore le festival de Salzbourg, la Staatsoper de Berlin où il apparaît encore dans Rocco de Fidelio en octobre 2016 sous la direction de Barenboim. Il reste pendant ce temps fidèle au festival de Savonlinna en Finlande où il interprétait encore Boris Godounov en 2015. Après ses adieux en 2016, il continue en fait de se produire régulièrement et figure encore dans quelques productions, avec Daland dans le Vaisseau fantôme en 2018 à Rome, le roi Marke encore à Budapest en juin 2018, et même Fasolt en septembre/octobre 2019 à la Staatsoper de Berlin. Il a par ailleurs créé une fondation destinée aux jeunes chanteurs finlandais.
La voix de la basse en scène était particulièrement impressionnante, impression renforcée par une stature imposante et une forte présence scénique. Ses appels au 2e acte du Crépuscule des Dieux était ainsi extraordinaires. A la fin de sa carrière, le chanteur concentrait ses moyens vers une attention accrue aux mots et aux nuances plutôt que sur le seul effet vocal, les moyens purement vocaux et le souffle étant par ailleurs amoindris.
Parmi ses différentes incarnations du répertoire lyrique et sa copieuse discographie, on retiendra tout d'abord ce roi Marke exceptionnel au plan vocal et dans la restitution des sentiments contradictoires du personnage. On peut l'écouter par trois fois avec son complice Daniel Barenboim, en vidéo à Bayreuth et à la Scala ou en disque à Berlin. L'interprétation et chaque fois absolument renversante et mémorable. On ira aussi vers son magnifique Gurnemanz, dont il reste le témoignage en vidéo sous la direction de Nagano, enregistrée en 2004 à Baden-Baden. On aurait aimé garder une trace de son incarnation quelques années plus tôt où la voix était au sommet de sa force. Il apporte dans ce rôle une présence extraordinaire. Et puis il y a cet incontournable rôle de Sarastro, qu'il estime avoir chanté plus de 1 000 fois. On dispose du très bel enregistrement dirigé par Harnoncourt mais aussi en vidéo à Zurich en 2002 puis à Salzbourg en 2005. L'autorité bienveillante du personnage est restituée avec un présence vocale unique. Et pour ceux qui veulent retrouver l'esprit de ses débuts, même si cela est plus anecdotique, des disques de tangos finlandais ont été réalisés à la fin des années 1990. Mais c'est pour ses interprétations extraordinaires et saisissantes dans Mozart et Wagner que la basse restera sans doute avant tout dans l'histoire du chant.
Cesare Siepi
Basse italienne (10.02.1923 - 5.07.2010)
Né à Milan il y suit un temps des cours au conservatoire mais serait avant tout un autodidacte puisqu'il se destinait plutôt à de venir instituteur. Il prend part à
à ensemble vocal spécialisé dans l'interprétation de madrigaux. Il est incité à se présenter à un concours de chant à Florence en 1941 et y remporte le premier prix. Cela l'amène à faire ses
débuts la même année au Teatro civico de Schio, en Vénétie, dans le rôle de Sparafucile dans Rigoletto de Verdi. Ce début de carrière est interrompu par la mobilisation pour la guerre.
Mais il refuse de rentrer dans l'armée fasciste italienne et se retrouve en Suisse (en fuite ou prisonnier), comme quelques uns de ses futurs collègues chanteurs; Il a l'occasion de recevoir
quelques nouvelles leçons à Lugano. Il reprend le chemin de chanteur professionnel au lendemain de la guerre, apparaissant dès la fin 1945 à Venise dans Nabucco de Verdi avec le rôle de
Zaccaria. L'année suivante, en août 1946, il se produit à la Scala de Milan avec les rôles de Ramfis dans Aida et de nouveau Sparafucile dans Rigoletto et en septembre dans
La force du destin. Il revient les trois années suivantes dans divers rôles dont Pogner dans Les maitres chanteurs de Nuremberg, le Grand inquisiteur dans Don
Carlo ou Mephistopheles dans Faust de Gounod. En 1948 il participe au grand concert donné par Toscanini pour les 30 ans de la mort du compositeur Boito. Il y chante des extraits de
Mefistofele et de Nerone. Ce début de carrière fulgurant se prolonge avec des apparitions à Mexico, mais aussi à Londres et au festival d'Edimbourg dans le cade de tournée de la
Scala. Sa carrière prend une nouvelle dimension en 1950 avec ses débuts au Metropolitan de New-York dans le rôle de Philippe II dans Don Carlo, vraisemblablement à la place de Boris
Christoff prévu initialement mais dont le visa avait effectivement été refusé par les Etats-Unis à cause de ses origines bulgares. Cette même année, il y incarne également un exceptionnel
Mephistopheles dans Faust de Gounod, les deux fois aux côtés de Jussi Björling. C'est le début d'une grande carrière dans les rôles de basse au Met qui va durer jusqu'en 1974 et pose le
chanteur comme un successeur d'Ezio Pinza, retiré de cette scène deux ans auparavant.
Il effectue ensuite des débuts mémorables dans Don Giovanni au festival de Salzbourg en 1953 sous la direction de Furtwängler. De nouveau il s'impose d'emblée comme le digne héritier d'Ezio Pinza dans ce rôle-titre qu'il va marquer tout autant de son empreinte. Pilier du Metropolitan opera pendant plus de 20 ans, il va également chanter à la Scala de Milan, à Florence, à Covent Garden, à l'Opéra de Vienne et au festival de Salzourg. Avec le Met où il se produit plus de 350 fois dans 17 rôles différents, c'est à l'opéra de Vienne qu'il se produit le plus souvent et dans ses grands rôles, en particulier Don Giovanni (43 fois), Figaro (20 fois), Philippe II (30 fois), Mehistopheles dans Faust (18 fois), Padre Guardiano dans La force du destin (28 fois), ou Colline dans La Bohème (19 fois). Dans une interview donnée en février 1986, il disait que "le secret est de ne jamais chanter sa dernière représentation". Il fait d'ailleurs de premiers adieux à la scène en avril 1989 mais donne bel et bien une ultime représentation à Vienne en novembre 1994 avec Ovoreso dans Norma, aux côtés de Maria Zampieri, Grace Bumbry et sous la direction d'Alberto Zedda. Au cours de sa carrière et au-delà de ses plus fameux rôles, il aborde un répertoire assez large allant de Monteverdi à Montemezzi en passant par Rossini, Donizetti, Wagner et notamment Gurnemanz dans Parsifal ou encore Dossifei dans La Kovantchina de Moussorgsky. A l'instar de son illustre prédecesseur, Pinza, il participe à des comédies musciales à Broadway.
Avec un timbre somptueux, sombre et profond, un ton impérial, une voix souple, une très grande présence vocale et scénique, il subjugue dès la première note émise. Ainsi son entrée dans Don Carlo de Verdi impressionne à la première note. On peut aisément apprécier cet immense artiste avec divers témoiganges de studio ou live ainsi qu'en video, même si la majorité des enregistrements a été réalisée dans les années 1950. Ainsi, son Mephistopheles enre gistré en live au Met en 1950 est vocalement magnifique et l'incarnation diabolique à souhait, sachant plier sa voix à des nuances multiples. En outre, sa prononciation française est plutôt bonne pour un chanteur italien à cette époque. Son Don Giovanni est légendaire, comme celui de Pinza, et il existe plusieurs enregistrements comme ces fameux live à Salzbourg 1953, 1954 et 1956), au Met dirigé par Böhm (en 1957) ou à Londres avec Solti (en 1962) et bien sûr les deux versions en studio dirigées respecivement par J.Krips et E.Leinsdorf. Et puis il y a cette version en video réalisée en 1954 à Salzbourg (publié par Deutsche Grammophon) en 1qui permet de prendre toute la mesure du charisme du chanteur sur scène. Enfin, le troisième grand rôle où il est essentiel est celui de Philippe. On peut l'écouter dès cette apparition première en 1950 au Met, ou dans un fameux live en 1958 à Salzbourg sous la direction de Karajan. On peut encore le retrouver dans ce rôle à Turin en 1954 ou à Florence en 1956, voire au Met en 1965. Mais dans ce rôle, on profitera de la possibilité du live réalisé un peu pluts tard, en 1972, avec Caballé, Bumbry, Corelli et Milnes tous d'un engagement bouleversant. Dans ce live, il offre un air "Ella giammai m'amo", absolument renversant jusqu'à cette note de ré grave final d'une tenue rare. On trouve ici la basse en pleine maturité vocale, au sommet après plus de 20 ans de carrière, montrant à quel point il fut et reste l'une des plus exceptionnelles voix de basses et l'un des plus grands chanteurs du 20e siècle.
Martti Talvela
Basse finlandaise (4.02.1935 - 22.07.1989)
Il naît à Hiitola (alors en Finlande, aujourd'hui en république de Carélie), dans une famille de fermiers. Il s'intéresse d'abord à la boxe mais il s'orinte vers le métier d'institeur qu'il exerce effecivement entre 1957 et 1960. Mais dans le même temps, il s'intéresse au chant et prend des cours à l'Académie de musique de Lahti puis se perfectionne à Stockholm. Il fait ses débuts en 1961 à Helsinki avec le rôle de Sparafucile dans Rigoletto de Verdi et se produit à l'Opéra royal de Suède durant la saison 1961/62, où il aborde de petits rôles dans plusieurs opéras, notamment Les maîtres chanteurs de Nuremberg (Hans Fotz), La Traviata (marquis d'Obigny), Don Carlo (un moine) et déjà le commandeur dans Don Giovanni aux côtés d'Ingvar Wixell dans le rôle titre et Cesare Valetti en Don Ottavio. Il rejoint la troupe de la Deutsche Oper de Berlin en 1962. Il est repéré par les frères Wagner et débute au festival de Bayreuth dès 1962 en Titurel dans Parsifal. Il s'y produira jusqu'en 1970 avec le landgrave dans Tannhäuser, Fasolt dans l'Or du Rhin, Hunding dans La walkyrie, Daland dans Le vaisseau fantôme et surtout le roi Marke dans Tristan et Isolde sous la direction de Karl Böhm. Sa carrière continue de se développer avec des apparitions à l'Opéra de Vienne et la Scala de Milan en 1965, puis Covent Garden à compter de 1970. En 1967 il aborde Boris Godounov à Düsseldorf, aban de le reprendre à Berlin et Munich en 1971 et de devenir l'un de ses plus grands rôles. En 1968 il chante au festival de Salzbourg le rôle du Commandeur dans Don Giovanni sous la direction de Karajan. Il y retourne dix ans plus tad, en 1978, pour incarner Sarastro, et chaque année jusqu'en 1984. Sa carrière internationale l'amène également à New-York à partir de 1968. Il y incarne pendant vingt ans ses grands rôles du répertoire wagnérien dont son fameux Gurnemanz, mais aussi son fameux Boris Godounov dès 1974, Dossifei dans la Kovantchina entre 1985 et 1988, ainsi qu'Osmin dans L'enlèvement au sérail, Sarastro dans La flûte enchantée, le prince Grémine dans Eugène Onéguine ou encore le père Guardiano dans La force du destin. Il se produit aussi à Chicago et Los Angeles, mais aussi à l'Opéra de Paris de 1974 à 1977, successivement dans Gurnemanz, Padre Guardiano et Sarastro. Il est par ailleurs le premier directeur artistique du festival de Savonlinna en 1972 et jusqu'en 1979. Malgré une stature impressionnante, le chanteur souffre de problèmes de santé dès le mileu des années 1970 et vont s'accroître dans les années 1980. Il réduit ses apparitions à compter de 1981, consacrant une partie de son temps à des travaux dans sa ferme en Finlande. En 1989, quelques mois avant de disparaître brutalement, il venat d'être nommé directeur de l'Opéra national de Finlande à Helsinki pour un mandat qui devait commencer en 1992.
Il disposait d'une voix exceptionnellement belle, chaude et ronde, moelleuse même, rayonnante et lumineuse comme rarement dans cette tessiture de basse. Aussi ce timbre soyeux convenait particulièrement bien pour Sarastro, le roi Marke ou Gurnemanz. Il laisse une belle discographie qui permet de le retrouver dans la plupart de ses principaux rôles, à l'exception malheureusement de celui de Gurnemanz à ce jour, et aussi dans la musique vocale et des mélodies. Dans Boris Godounov, on pourra aisi apprécier à la fois son superbe Pimène dans l'enregistrement réalisé par Karajan et dans le rôle titre sous la direction de Semkow et les troupes de la radio de Pologne. Mais pour en premier lieu, avant même son Osmin avec Solti ou son Daland notamment avec Klemperer, on écoutera cet émouvant roi Marke dans ce célèbre enregistrement réalisé à Bayreuth en 1966 avec Böhm et édité par Deutsche Grammophon, et bien sûr son somptueux Sarastro. Pour en apprécier toute la noblesse et la beauté du chant, on dispose du témoignage en video réalisé à Salzbourg en 1982 et des enregistrements dirigés par Solti ou par Levine tous les deux à Vienne.